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26 juin 2012 2 26 /06 /juin /2012 10:09

Les autorités sénégalaises ont suspendu aussi hâtivement qu’elles l’avaient prise, la décision de livrer l'ex-dictateur tchadien Hissène Habré à la justice de son pays. Puis, l'option d'une extradition vers la Belgique s'est pointée. Dernier épisode d'un imbroglio politico- judiciaire qui dure depuis une décennie

Mise à jour du 25 juin 2012: Le président sénégalais Macky Sall a affirmé que l'ancien chef d'Etat tchadien Hissène Habré, accusé de crimes contre l'humanité, ne sera pas extradé en Belgique mais jugé au Sénégal, dans un entretien à l'hebdomadaire Jeune Afrique paru le 25 juin 2012.

***

Après la décision inattendue, le 8 juillet 2011, de renvoyer dans son pays l'ex-homme fort de N'Djamena, on a cherché désespérement des soutiens à cette mesure prise par le Sénégal. On a plutôt eu droit à un concert de désapprobations. La clameur est venue aussi bien des partisans de Hissène Habré que des militants de droits de l’homme ou même des parties civiles.
Devant l’impasse judiciaire, le président sénégalais, Abdoulaye Wade, peut se servir de la béquille politique comme il en a fait la preuve par le passé, pour se débarrasser de l’encombrant hôte qu’est Hissène Habré. Le gouvernement tchadien a souhaité le 22 juillet «que le Sénégal extrade  Hissène Habré vers la Belgique, qui lui en a fait la demande en 2005 et l’a réitéré en 2011 ». Le Haut commissaire des Nations unies aux droits de l’Homme, Navi Pillay, a souligné dans une déclaration du 12 juillet que la suspension du transfert de Hissène Habré ne devait pas signifier un retour au statu quo:

«Habré ne devrait pas continuer à vivre en toute impunité au Sénégal, comme il le fait depuis ces vingt dernières années».
«Abriter une personne ayant commis des actes de torture et autres crimes contre l’humanité sans la juger ou l’extrader constitue une violation du droit international».
Imbroglio politico-judiciaire

L’extradition obéit à une procédure judiciaire. Or en la matière, la justice sénégalaise a déjà dit le droit en déclarant soit son incompétence, soit un avis défavorable à son extradition vers la Belgique qui en avait fait la demande en 2005, en vertu de «la compétence universelle».
Pour Me El Hadj Diouf, avocat sénégalais d'Hissène Habré, les choses traînent encore parce que tout simplement «son client ne peut être ni extradé ni jugé». Toutefois, tempère Me Assane Dioma Ndiaye, président de la Ligue sénégalaise des droits humains (LSDH) et conseil des victimes, le chef de l’Etat sénégalais peut passer outre l’avis défavorable émis par la Chambre d’accusation et signer le décret d’extradition. Même s'il déclare être pessimiste quant à une telle option «compte tenu du contexte politique qui prévaut en ce moment au Sénégal».
Il faut dire qu’un lobby pro-Habré très actif au Sénégal s’oppose à toute expulsion de l’ex-homme fort de N’Djaména.  A quelques mois d‘une présidentielle incertaine, beaucoup d’observateurs à Dakar ne voient pas le président Abdoulaye Wade, 86 ans et candidat à sa propre succession, prendre un tel risque. Cependant, il existe une autre option, tout aussi risquée mais certainement moins onéreuse au plan politique. Parallèlement à une demande d’extradition, la Belgique a aussi introduit une requête devant la Cour internationale de Justice (CIJ) siégeant à La Haye. Un mémoire devrait y être déposé  avant le 26 août par les autorités sénégalaises. Ayant déclaré qu’il ne pouvait plus juger M. Habré, le Sénégal devrait s’accrocher à cette perche pour l'extrader afin d'une part de ne pas s’exposer à «une violation du droit international» et d’autre part, de pouvoir justifier devant l'opinion nationale une livraison de l’ex-président tchadien à la justice internationale.
Un célèbre avocat africain avance quant à lui de sévères obervations:

«Il y a une compétition malsaine entre les organisations de droits de l’homme depuis plusieurs années dans le dossier Habré; ce qui a dénaturé l’objectif initial de faire éclater la vérité et de dire le droit.»

Cet avocat s’insurge en plus contre l’attitude de la communauté internationale, prompte à ériger une cour internationale pour juger les assassins d’un ancien Premier ministre (le Libanais Rafik Hariri, ndlr) mais qui affiche une certaine indifférence par rapport aux crimes actuels en Syrie et s'abstient d’ériger un tribunal international pour juger Habré.
Ces dernières péripéties du dossier Habré, constituent en réalité l’arbre qui cache la forêt d’une longue bataille politico-judiciaire de plus de dix longues années. Hissène Habré est soupçonné d’avoir perpétré avec son régime 40.000 assassinats politiques, sans compter les cas de tortures systématiques. Les associations de victimes, épaulées par plusieurs organisations de droits de l’homme se sont investies avec beaucoup de hargne pour son jugement devant un tribunal. 
Les déboires de l’homme qui a dirigé le Tchad de 1982 à 1990 ont commencé dès janvier 2000, trois mois avant l’accession d'Abdoulaye Wade à la magistrature suprême. Suite à une plainte d’un collectif de victimes des geôles d'Habré, l’ex-dictateur est inculpé par la justice sénégalaise de «complicité d’actes de tortures». Mais, en juillet de la même année, la Cour d’appel déclare les juridictions sénégalaises incompétentes pour poursuivre sur son sol un chef d’Etat étranger, fut-il déchu.

«Gifle magistrale à la justice»

Saisi d’un recours, la Cour de cassation devait par la suite confirmer l’arrêt. Entretemps, Abdoulaye Wade est devenu président de la République du Sénégal. Il a fait de Me Madické Niang, un de ses fidèles, mais surtout, ex-avocat de Hissène Habré, son conseiller aux affaires juridiques. Le juge Demba Kandji, réputé intègre, en charge du dossier Habré, avait déjà entendu plusieurs victimes, ainsi que le président de la commission d’enquête tchadienne qui a reconstitué le registre d’horreurs dont on accuse l'ancien dictateur tchadien. Mais, contre toute attente, le juge Demba Kandji est muté par le Conseil supérieur de la magistrature, dirigé par le président de la République. Des responsables d’organisations de droits de l’homme n’avaient pas manqué d’y déceler une manœuvre politique.
«Une gifle magistrale à la justice sénégalaise», avait alors commenté le président de la Rencontre africaine pour les droits de l'homme (Raddho), Alioune Tine, tandis que Me Sidiki Kaba de l'Organisation nationale des droits de l'homme (Ondh) rappelait avec amertume: «Quand la politique entre dans un prétoire, la justice en sort».  Soupçons légitimes ou pas? Habré a en tout cas, par la suite, bénéficié d’un non-lieu de la Chambre d’accusation. Déjà à cette époque le président Abdoulaye Wade prenait une solution politique, faute d’avoir obtenu de la justice sénégalaise une solution définitive: «Je lui ai donné un délai pour quitter le Sénégal», avait-il asséné en avril 2001 dans une interview à la BBC.
En 2006, le Sénégal sollicite et reçoit de l’Union africaine (UA) le mandat de juger Habré. Le débat fait rage entre les parties civiles et les avocats d'Hissène Habré. Pour les premiers, les engagements internationaux du pays ainsi que la primauté du droit international suffisent. A l’opposé, les avocats de l’ex-président tchadien se réfèrent à l’arrêt rendu par les tribunaux sénégalais, brandissent «l’autorité de la chose jugée». Qu’à cela ne tienne, l’Etat du Sénégal affiche une grande détermination pour exécuter le mandat de l’UA. C’est dans ce sens que l’Assemblée nationale du Sénégal a procédé en avril 2008, à une modification de la Constitution introduisant en son article 9, une exception à la non rétroactivité de la loi pénale pour le crime de génocide, les crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Le «verrou» juridique a sauté et la mise en place d’un tribunal spécial est en vue. Reste la question épineuse du budget que nécessite un tel procès. Les autorités sénégalaises l’avaient estimé au départ à 27 millions d’euros. Mais après moult réévaluations, ce montant s’est stabilisé autour de 8,5 millions d’euros. La France, le Luxembourg, le Tchad et l’UA, s’engagent à financer le procès.

«Je veux m'en débarrasser» 

 Le président Wade s’est plaint du peu de soutien manifesté par la communauté internationale pour réunir l’argent nécessaire. Las de ces lenteurs et des promesses non tenues, il avait déclaré lors d’une interview en décembre 2010 avec France 24, vouloir se débarrasser de cet encombrant hôte:

«Franchement, je regrette d'avoir accepté (le mandat de l’UA pour juger Habré, ndlr). Parce que je n'ai pas obtenu le minimum de soutien que je cherchais. Actuellement, je veux que l'Union africaine reprenne son dossier. Je veux m'en débarrasser ».
Malgré cela, le président Wade continuait à manifester son impatience, voire son ras-le-bol. Au même moment, M. Habré et ses avocats qui avaient saisi d'une requête, en octobre 2008, la Haute Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), voyaient comme une lueur. L’arrêt rendu, fin 2010, est favorable à Hissène Habré. La Cour ordonne en effet au Sénégal «le respect du principe absolu de non rétroactivité» et lui exige de se conformer aux décisions rendues par ses juridictions nationales, à savoir notamment le respect de «l'autorité de la chose jugée». L’institution judiciaire communautaire a même cru utile d'apporter des précisions:
«Le mandat reçu de l'UA par le Sénégal lui confère plutôt une mission de conception et de suggestion de toutes modalités propres à poursuivre et faire juger dans le cadre strict d'une procédure spéciale ad hoc à caractère international telle que pratiquée en droit International.»

Joignant l’acte à la parole, le président du Sénégal décide, le 20 janvier 2010, quelques jours avant le 16e sommet de l’UA à Addis Abeba en Ethiopie, pour déclarer officiellement le retour à l’organisation continentale du dossier Habré. Toutefois, il affiche sa préférence pour un jugement de l’ex-homme fort de N’Djamena en terre africaine. La réaction de l’UA est tombée lors du récent sommet de Malabo (Guinée équatoriale) auquel le chef de l’Etat sénégalais n’a pas pris part. Le Sénégal est prié de juger rapidement Habré ou de l’extrader. La réponse de Wade a été presque immédiate: la décision arrêtée est de l’expulser vers son pays d’origine.
Après la décision de suspendre l’expulsion de l'ancien président tchadien, les autorités sénégalaises annoncent «engager immédiatement des consultations avec les Nations unies, l’Union africaine et la communauté internationale pour qu’une solution puisse intervenir rapidement». En attendant, le jugement de Hissène Habré tourne en rond.
Cheikh Diop

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25 juin 2012 1 25 /06 /juin /2012 19:38
Mokhtar Belmokhtar entouré de ses lieutenants. Mokhtar Belmokhtar entouré de ses lieutenants. © SIPA

Que se passe-t-il lorsqu'un journaliste croise par hasard, dans le nord du Mali, la route de Mokhtar Belmokhtar, l'un des djihadistes les plus recherchés au monde ? Récit d'une rencontre avec un émir d'Aqmi.

On m'avait pourtant prévenu. Ces jours-ci à Gao, dans le nord du Mali, il ne fait pas bon avoir le teint clair. À l'entrée de la ville, un soldat du Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA) s'était déjà mépris sur la couleur de ma peau. « Si vous êtes blanc, m'avait-il mis en garde, attention. Sachez qu'il y a Al-Qaïda dans la ville. » Je l'avais écouté avant de reprendre la route, incertain de la réalité du danger encouru. Les islamistes, je les avais déjà vus à Tombouctou, quelques semaines plus tôt. J'avais rencontré certains de leurs responsables locaux, silhouettes poussiéreuses et enturbannées. Rien de très rassurant. Rien de très alarmant non plus.

À Gao, je ne me suis pas contenté de quelques vagues sous-chefs. Ce 6 juin au soir, je me promène le long du fleuve Niger. Surnommé « la plage », l'endroit est couru : les habitants de la ville aiment venir y admirer les couchers de soleil. Quelques pêcheurs, des hommes (les femmes, depuis que les islamistes ont pris le contrôle de la ville, sont moins nombreuses), des jeunes qui se baignent. L'un d'eux d'ailleurs me fait des signes, me conseille de ne pas poursuivre plus avant. Quand je comprends ce qu'il cherche à me dire, il est déjà trop tard.

Entouré de ses lieutenants, le kalachnikov au pied, Mokhtar Belmokhtar me fixe de son unique oeil valide. L'un des trois émirs d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) est là, assis au pied d'un pick-up, face au fleuve. J'ai toujours eu envie de rencontrer celui qu'on appelle parfois le Borgne, mais m'adresser à lui à l'improviste n'est probablement pas la meilleure garantie de réussite de l'interview. Aucun journaliste - fût-il malien - travaillant pour un média basé à Paris ne tiendrait vraiment à s'attarder. Belmokhtar, 40 ans cette année, traîne une triste réputation de djihadiste violent et cruel, acquise dans le maquis algérien pendant les années 1990. Fasciné par les moudjahidine afghans depuis sa plus tendre enfance, il les a rejoints à l'âge de 19 ans, avant de rentrer dans son pays, en Algérie, et de devenir l'un des chefs des Groupes islamiques armés (GIA), puis du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), devenu depuis Aqmi. Le Sahel n'a que peu de secrets pour lui dorénavant et il serait impliqué dans plusieurs rapts effectués dans la région (les Espagnols en 2009 ou encore les deux jeunes Français morts début 2011). Sa biographie sanglante se bouscule dans ma tête alors que, le coeur battant, je poursuis ma route.

L'émir d'Aqmi, dit le Borgne, traîne une réputation de djihadiste violent et cruel.

Quelques mètres plus loin, le groupe me rattrape et me questionne en hasaniya, un dialecte parlé par les Arabes du Mali, de la Mauritanie et du Sahara occidental. Comment je m'appelle ? Qu'est-ce que je fais là ? De qui suis-je le parent ? Le cousin qui m'accompagne se charge de répondre pour moi, en évitant de mentionner ma profession. Belmokhtar reste muet, me jauge, puis me serre la main. Je n'en mène pas large.

Plus tard, on me dira que j'ai eu de la chance que ça n'aille pas plus loin, que « je vaux des euros » et que j'ai « failli être enlevé ». Est-ce vrai ? Impossible à dire. Mais ainsi va Gao. Une ville où les gens du Nord aimaient passer leurs vacances pour profiter de la relative fraîcheur du fleuve, et où le grand jeu des enfants est désormais de demander aux soldats de tirer en l'air à l'arme automatique. Une ville où votre couleur de peau suscite la convoitise. Une ville dont la rébellion touarègue rêve de faire sa capitale, mais que seuls les islamistes contrôlent vraiment. Une ville où l'on peut croiser, au détour d'une paisible promenade, l'un des hommes les plus recherchés au monde.



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25 juin 2012 1 25 /06 /juin /2012 19:33

 

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Le Tchad et la disparition d’Ibni Oumar Mahamat Saleh. Les pressions internationales s’accentuent sur le pouvoir tchadien, et son représentant diplomatique à Genève ne sait quoi faire !


Le Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme dont le siège est à Genève, la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) ; Amnesty International et plusieurs autres ONG tchadiennes et internationales réclament de plus en plus de clarifications sur le cas de l’opposant politique, le professeur IBNI OUMAR Mahamat Saleh enlevé à son domicile de N’Djamena le 3 février 2008 et disparu depuis lors.

 

Le dossier Ibni Oumar continue de susciter une vague de protestations et de pressions à Genève. Les ONG et divers supports médiatiques ont souligné récemment à Genève que l’impunité plombe le pays de Toumaï et qu’il est urgent que les auteurs des violations des droits de l’homme répondent de leurs actes. Ils ont insisté sur le fait que certaines autorités tchadiennes utilisent leur fonction et leur poste pour rester à l’abri des poursuites. Le Haut Commissariat et son Conseil des droits de l’homme avaient qualifié de problème urgent l’impunité judiciaire qui prévaut au Tchad, notamment dans le cas de la disparition du professeur Ibni Oumar Mahamat Saleh.

 

Les différentes instances des droits de l’homme à Genève se sont insurgées contre l’absence de réponse du Tchad face aux différentes interpellations. Depuis septembre 2009 jusqu’à la présente session 2012 du Conseil des droits de l’homme des Nations unies à Genève, le Tchad est toujours interpellé sur ce dossier et les autorités tchadiennes ne répondent toujours pas alors qu’il a une représentation diplomatique présente à Genève. Cette situation discrédite de plus en plus le pouvoir tchadien. L’ambassadeur Bamanga ne sachant quoi faire préfère plus s’éclipser que de défendre la position de son gouvernement. Or, par respect aux valeurs qui lient le Tchad aux institutions des droits de l’homme et à ses différents partenaires, le pouvoir en place ou son représentant diplomatique, devrait au moins exprimer et défendre la position du Tchad vis-à-vis de ce dossier.  

 

Le fait de refuser ou d’avoir peur de s’exprimer, avec des arguments juridiquement fondés et en accord avec le respect des droits de l’homme, devant les instances onusiennes et internationales alors qu’on y représente officiellement son pays, revient à fuir ses responsabilités ou du moins à ne pas assumer la responsabilité des actes commis par le pouvoir qu’on représente. Cela ne fait que mettre actuellement le Tchad dans une situation délicate tout en écornant son image aux yeux du monde ! De nombreux cris d’alarmes fusent de partout, mais les autorités tchadiennes persévèrent dans leur silence assourdissant. Pour autant, les ONG à Genève n’abandonnent pas. Pour elles, il faut continuer à apporter un éclairage juste de la situation globale des droits de l’homme au Tchad en vue de son amélioration, même si en face, c’est-à-dire du côté du gouvernement tchadien ou de son représentant à Genève, il n’y a pas de répondant.

 

A l’évidence, l’affaire de la disparition de l’opposant IBNI OUMAR Mahamat Saleh continue par mobiliser la diaspora tchadienne, des personnalités politiques européennes, des ONG et dans le monde médiatique en Europe pour que la vérité finisse par triompher. Derrière cette affaire, c’est le sort de tous les disparus des événements de 2008 qui est en filigrane. Cet élan de solidarité démontre aussi la prise de conscience des personnalités européennes attendues ce jour à Genève et qui pourront contribuer à faire évoluer ce dossier. C’est aussi, peut-être, le début d’un signal lumineux envoyé par la nouvelle équipe au pouvoir en France. Rien n’arrêtera la dénonciation et la médiatisation de cette disparition jusqu’à ce que lumière soit faite, confie un membre d’une ONG à Genève. Gageons que ce cela le cas, et un début d’un véritable changement au Tchad.

 

Talha Mahamat Al

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24 juin 2012 7 24 /06 /juin /2012 20:55
Vue du désert au Tchad, le massif d’Ennedi, la région d’Ounianga Kébir, le lac Yoan.
Vue du désert au Tchad, le massif d’Ennedi, la région d’Ounianga Kébir, le lac Yoa

Au Tchad, on trouve parmi les plus belles régions sahariennes comme l’Ennedi, le « désert vivant » au Nord. Un autre joyau tchadien, les Lacs Ounianga, situé à 1 300 km au nord de la capitale Ndjamena, est candidat à l’inscription sur la liste du Patrimoine mondial. Le comité de l’Unesco se réunit à partir de ce 24 juin jusqu’au 6 juillet à Saint-Pétersbourg en Russie pour décider qui parmi les 33 nouveaux sites en lice - dont 5 sites africains- peut rejoindre la prestigieuse liste des « valeurs universelles exceptionnelles ». Entretien avec Dr Baba Mallah, directeur général du centre national d’appui à la recherche (CNAR) au Tchad qui suit le projet des Lacs Ounianga depuis dix ans.

RFI : Le Tchad souhaite que les Lacs Ounianga entrent dans le Patrimoine mondial de l’Unesco. Quelles sont les chances de réussite ?

Baba Mallah : Je crois fortement que les Lacs Ounianga vont être inscrits sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco. Nous avons fait des études scientifiques et des analyses comparatives avec d’autres lacs se trouvant dans des zones similaires. Nous avons pu mettre en évidence que nous avons ici des valeurs universelles exceptionnelles.
 
RFI : En quoi ce site de lacs est-il unique au monde ?
 
B.M. : D’abord, les lacs ont une structure géologique unique et une histoire climatologique sans précédente. Nous avons prélevé des carottes sédimentaires de 16 mètres de profondeur qui nous donnent des informations les plus détaillées, les plus complètes connues aujourd’hui en climatologie. Avec ces informations, nous pouvons reconstituer les environnements, les climats et, avec des modélisations mathématiques, dans l’avenir peut-être aussi comprendre comment le climat peut changer tant au niveau local qu’au niveau mondial.
 
RFI : Le site Ounianga comprend une cinquantaine de lacs. Entre autres le lac d’Ounianga Kébir qui possède la plus grande évaporation de par le monde. Un lac nourri exclusivement par la nappe phréatique fossile. Ce sont ces superlatives qui mériterait d’entrer dans le Patrimoine mondial ?
 
B.M. : Le lac d’Ounianga Kébir, ce sont 18 petits lacs. Le plus grand s’appelle le lac Yoan qui a une profondeur de 27 mètres. Il est le plus profond des lacs connus aujourd’hui dans le désert. Quand on parle du désert, on ne parle pas uniquement de déserts chauds, il y a aussi des déserts froids ou des déserts comme le désert Gobi avec des saisons froides et chaudes.
De l’autre côté, on a un autre lac qui est aussi particulier, malgré la très forte évaporation d’eau. Le lac Boukkou fait partie des lacs Ounianga. Il est le plus grand lac d’eau douce dans le désert connu aujourd’hui.
 
RFI : Jusqu’à ce jour, le Tchad n’a pas de site qui figure sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco. Est-ce qu’il s’agit d’une négligence de la part du Tchad ou une sorte de discrimination de la part de l’Unesco ?
 

B.M. : Non, ce n’est pas une discrimination de la part de l’Unesco. L’Unesco nous a beaucoup soutenus dans le processus. Peut-être que nous, nous nous réveillons un peu tardivement. Mais là, nous allons continuer. Nous n’allons pas nous arrêter avec les Lacs Ounianga. La prochaine étape est une zone aussi exceptionnelle qui s’appelle la région d’Archeï, qui est aussi devenue une priorité du chef de l’Etat. Il faut sauver cette région et pour cela il faut l’inscrire aussi sur la liste du Patrimoine mondial.
 
RFI : Certains comparent l’inscription des sites dans le Patrimoine mondial avec une chasse à la poule aux œufs d’or. Quels bénéfices attendez-vous de l’inscription des Lacs Ounianga pour le Tchad ?
 
B.M. : Nous nous attendons d’abord la préservation et la conservation de ces lacs pour les générations futures. Cela est très important pour nous. Avec la découverte de Toumaï, l’ancêtre des humains découvert au Tchad, nous sommes le berceau de l’humanité. Si nous avons des sites inscrits au patrimoine mondial, nous pensons que ceci pourrait attirer à terme des touristes pour notre pays. Déjà aujourd’hui, il y a des gens qui viennent, qui aiment le désert, qui aiment voir les lacs dans le désert, cela aussi est un phénomène.

Y a-t-il une sous-représentation de l’Afrique sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco ?
Dr Baba Mallah, directeur général du Centre national d’appui à la recherche (CNAR) à Ndjamena.
 
 
 
 
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23 juin 2012 6 23 /06 /juin /2012 22:44
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Affaire Mahamat Saleh Annadif : Detenu en prison sans jugement.
(Recapitulatif)
Mahamat Saleh Annadif, Secrétaire Général de la Présidence du Tchad, a été arrêté le 17 avril 2012. Bien que ses avocats n’aient pas eu accès au dossier il semble que leur client soit inculpé de complicité dans une affaire de détournement de deniers publics à la Direction Générale des Grands Travaux et Projets Présidentiels.
Comme beaucoup d’affaires politico-judiciaires sur la place publique tchadienne ces derniers temps, l’instruction du dossier de Mahamat Saleh Annadif fait fi des droits de la défense et de la procédure pénale tchadienne.
Les associations des droits de l’homme, des partis politiques, les syndicats et de nombreuses organisations de la société civile essaient de faire pression sur le pouvoir politique tchadien afin que le droit tchadien soit respecté par le parquet, que la séparation des pouvoirs soit effective avec un ordre judiciaire indépendant du pouvoir en place
 
Les faits :
Mahamat Saleh Annadif était Secrétaire Général de la Présidence de la République du Tchad.
 
Une affaire liée à l’affaire Zen Bada :
Lors de l’instruction du dossier de M. Zen Bada (Directeur des Grands Travaux et Projets Présidentiels) pour détournement de fonds, les enquêteurs ont trouvé une correspondance adressée au Directeur Général de la BCC, l’ordonnant «  que la gestion et la signature du compte Hadj 371 178 5740 ouvert dans vos livres sont maintenant confiées à la Direction Générale des Grands Travaux et Projets Présidentiels ». Comme Cette pièce porte la signature de M. Annadif, il a été convoqué par le juge d’instruction pour fournir des explications.                                                                                                                                                                                  
 
Le Secrétaire Général de la Présidence a alors produit devant le juge d’instruction la copie de cette même pièce, conservée au Secrétariat Général de la Présidence et portant le visa du Président de la République, approuvant le transfert. Ayant produit une justification prouvant que le transfert litigieux avait été fait sur instructions du Président de la République, M. Annadif n’a pas été inquiété.
Malgré des rumeurs circulant à N’Djaména et sur l’Internet et faisant état tantôt de son arrestation tantôt de son interdiction de voyager, M. Annadif a pu repartir en France pour des examens médicaux.
 
Arrestation :
A son retour de la France, le 09 avril 2012, il a reçu une convocation le 16 avril pour se présenter devant le Juge d’instruction le lendemain, 17 avril 2012. Mahamat Saleh Annadif se présente devant le juge d’instruction. Il se voit alors notifier par le juge qu’il y a des preuves qui établissent sa complicité dans cette affaire de détournement sans pour autant lui produire ces éléments de preuves. Sans autre forme de procès, le juge l’accuse de complicité de détournement de fonds et le met sous mandat de dépôt. En cinq minutes, le Secrétaire Général de la Présidence passe de la liberté à la prison.
 
Détention :
Il est gardé dans un premier temps à la Brigade de Stupéfiant de Moursal avant d’être transféré à Moussoro le 22 avril.
Ses avocats dont son avocat français qui avait fait spécialement le déplacement ont demandé à avoir accès au dossier d’accusation de leur client, ce qui leur a été refusé. Maitres Josué Ngadjadoum, Sobdibé Zoua et Serge Terracol-Lajeune ont alors prévenu l’opinion nationale et internationale par un point de presse, le mardi 24 avril 2012.
Ils ont également voulu rencontrer leur client à Moussoro, le 1er mai 2012, mais l’accès leur a été interdit. Les avocats ont alors saisi une nouvelle fois l’opinion en faisant une conférence de presse, le jeudi 03 mai. Ils ont également écrit une lettre au Président de la République, président du Conseil Supérieur de la Magistrature, pour se plaindre du non-respect des droits élémentaires de la défense dans cette affaire.
 
 
Ce n’est que le 5 mai 2012 que les avocats ont pu rencontrer leur client pendant 30 minutes.
 
 
Une procédure juridique défaillante
Juge d’instruction incompétent :
Les avocats de Zen Bada ont attaqué l’affaire de leur client, pour des vices de procédure, devant la Cour Suprême. Selon le code de Procédure Pénale Tchadien, le juge d’instruction est d’office dessaisi en attendant le verdict de la Cour Suprême. Malgré cela, le juge d’instruction a continué son travail comme si de rien n’était. Mais tous les actes du juge d’instruction après la saisine de la Cour Suprême sont nuls. L’arrestation de M. Annadif fait partie de ces actes touchés par la nullité.
 
 
Absence de réquisition supplétive :
Monsieur Annadif a été entendu dans l’affaire Zen Bada en tant que témoin. Pour faire passer une personne du statut de témoin à celui d’accusé il faut que le Procureur de la République ait fait une réquisition supplétive. A la connaissance des avocats aucune réquisition supplétive n’a été faite. En inculpant Mahamat Saleh Annadif pour complicité de détournement de déniés public, le juge d’instruction viole donc les dispositions du Code de Procédure Pénale Tchadien.
 
 
De « prison » en prison :
M.    Mahamat Saleh Annadif n’a pas été transféré à la maison d’arrêt de N’Djaména mais il a été gardé dans les locaux de la Brigade de Stupéfiant de Moursal. Cet endroit n’est pas une prison et ne peut servir à la détention même provisoire de détenu. C’est encore une fois en violation des dispositions du Droit Tchadien que M.Annadif a été gardé dans ces locaux.
 
Le 22 avril à 5h00 du matin, le prisonnier est transféré au « bagne » de Moussoro sans que sa famille et ses avocats ne soient prévenus. Ce transfert viole également les dispositions du droit.
 
Violation des droits de la défense :
Le collectif des avocats de M.Annadif, Maitres Josué Ngadjadoum, Sobdibé Zoua, Mogna et maitres Terracol-Lajeune (barreau de Toulouse), a protesté devant le Président de la République du non-respect des droits de la défense notamment en ce que :
Les avocats se sont vu interdire l’accès à leur client à Moussoro et ce jusqu’au 5 mai 2012 alors même que « les dispositions de l’article 43 (du Code de Procédure Pénale) qui disent en fait que l’inculpé, aussitôt après son inculpation peut communiquer librement avec son conseil »[1]
Le juge d’instruction refuse aux avocats l’accès au dossier de leur client, dossier sans lequel ils ne peuvent préparer sa défense. « Le juge d’instruction a refusé de mettre le dossier (d’accusation) à notre disposition alors même que selon la loi, il est obligé de mettre le dossier à notre disposition pour pouvoir assurer notre travail. Aujourd’hui nous ne savons pas ce qu’il y a dans ce dossier, qu’est-ce qu’on reproche exactement à Monsieur Mahamat Saleh Annadif. » [2]
 
 
Non-respect du statut de M. Annadif :
En tant que Secrétaire Général de la Présidence, M.Annadif a un statut assimilé à celui des ministres de la République. Il convient donc de le juger en fonction d’une législation spéciale devant la Haute Cour de Justice. Cette procédure est volontairement occultée par le parquet et dans l’affaire Annadif et dans les cas des deux ministres arrêtés dernièrement [3].
 
 
Non-respect de la législation spéciale en matière de détournement de fonds publics :
Le parquet ne respecte pas la législation spéciale en matière de détournement de fonds publics et en particulier les instances susceptibles de saisir le parquet ou la procédure d’enquête préalable avant mise en accusation [4].
 
 
Recours devant la chambre d’accusation :
Les avocats de Monsieur Annadif ont saisi la chambre d’accusation et lui ont présenté quatre chefs de nullité de la procédure engagée contre leur client. La chambre  a rejettée la requette des avocats le 10 mai 2012.
 
Dimensions politiques d’un non-respect du Droit Tchadien :
Les arrestations ou les projets d’arrestation de ces derniers temps avec M.Annadif et deux ministres se passent au moment où la justice tchadienne est sur la sellette de la communauté internationale dans la retentissante affaire Gali (affaire toujours en cours puisque après avoir félicité les juges d’avoir condamné Gali en première instance, le ministre de la justice a fait faire appel de la décision rendue en faveur de M.Gali, en Appel, devant la Cour Suprême et n’a pas manqué de sanctionner le courageux juge Emmanuel Derkeumbé qui a mis à nu ses visés).
Les parlementaires Tchadiens se plaignaient le 25 mars 2012 d’une « dangereuse dérive autocratique du pouvoir » suite aux poursuites contre des membres de l’opposition ou de la société civile : Gali N’gothe Gatta, Saleh Kebzabo, Dezoumbet Passalet, Ibni Oumar Mahamat Saleh, … Cette fois-ci les foudres de la justice s’abattent sur des personnalités proches du pouvoir : M. Zen Bada mais aussi des ministres et le Secrétaire Général de la Présidence.
L’opération « mains propres » serait mieux accueillie si elle se faisait dans le plus strict respect du droit Tchadien.
 
«  En refusant de suivre les procédures régulières, en matière judiciaire et en ignorant les cours spécialisées et la police en charge des crimes financiers, censées monter les dossiers d’inculpation en bonne et due forme, il y a anguille sous roche. Soit l’on craint de laisser du temps aux mis en cause pour préparer leur défense, soit les dossiers sont vides : dans ce cas, la seule chance d’humilier la “cible” est de passer par un détour extrajudiciaire. L’emprisonnement préalable devient ainsi une procédure idoine de règlement de compte aux amis fidèles devenus gênants, encombrants ou portant ombrage aux “affaires” de certains caciques du régime »[5].
 
Le non-respect du droit, les déclarations fracassantes du ministre de la justice dénonçant un complot contre l’État dès qu’une personne demande publiquement le respect de l’État de Droit, le caractère expéditif de procédures engagées sur de simples dénonciations… tout cela conforte malheureusement les craintes des démocrates vis-à-vis de la situation du Tchad.
Les violations répétées et sans vergogne du Droit semble prouver, malgré les démentis du ministre tchadien de la justice, que l’ordre judiciaire est ou bien incompétent, malgré les milliards investis par l’Union Européenne dans le cadre du programme de soutien au pouvoir judiciaire Tchadien, ou bien soumis à un pouvoir exécutif qui l’utilise pour écarter les personnes lui faisant de l’ombre.
« Le fait de procéder à de tels schémas pour arrêter certains caciques du régime est une erreur monumentale. Car, cette façon de faire révolte et enlève en nos institutions leurs valeurs sacrées. Autrement dit, c’est le recul d’une démocratie qui a déjà fait du chemin [6]. »
Le pays a besoin que « les partenaires internationaux du Tchad, les organisations internationales, régionales et sous régionales et les différentes assemblées supra nationales soient interpellés afin d’obliger l’État tchadien à respecter les lois et que soient préservées les prérogatives et la sécurité des acteurs politiques et sociaux il faut sauver les libertés et la démocratie au Tchad afin de préserver la paix » (mémorandum des parlementaires).
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23 juin 2012 6 23 /06 /juin /2012 22:35
Les arrestations arbitraires se sont multipliées, tout comme les détentions illégales, les actes de torture et les agressions contre des défenseurs des droits humains, des journalistes et des syndicalistes. Les viols et les autres formes de violences infligées aux femmes et aux filles étaient courants. Les expulsions forcées se sont poursuivies dans la capitale, N’Djamena. Des membres des forces de sécurité tchadiennes et de groupes armés responsables d’atteintes aux droits fondamentaux n’ont pas été tenus de rendre compte de ces actes, tandis que les victimes étaient abandonnées à leur sort.

Contexte

Des élections législatives et présidentielle ont eu lieu respectivement en février et en avril. Le scrutin présidentiel a été boycotté par l’opposition. Le président sortant, Idriss Déby, a été réélu et a formé un nouveau gouvernement en août.

Plusieurs milliers de Tchadiens sont rentrés de Libye en raison de l’escalade de la violence dans ce pays. Plus de 280 000 réfugiés soudanais du Darfour et environ 130 000 Tchadiens déplacés vivaient toujours dans des camps dans l’est du Tchad. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a examiné avec le Tchad et le Soudan la possibilité d’organiser un retour volontaire des réfugiés soudanais. Au moins 68 000 réfugiés, des Centrafricains pour la plupart, vivaient toujours dans des camps situés dans le sud du Tchad.

Plusieurs milliers de soldats tchadiens demeuraient déployés près de Goré, ville à la frontière de la République centrafricaine, où ils étaient stationnés depuis décembre 2010.

Violences faites aux femmes et aux filles

Cette année encore, les viols et les autres formes de violence contre les femmes et les filles demeuraient très courants dans différentes régions du Tchad. Au nombre des victimes figuraient des Tchadiennes déplacées, des réfugiées mais aussi des habitantes locales et quelques enfants. Par crainte de représailles de la part des auteurs des violences, qui appartenaient souvent à la communauté de la victime, aux groupes armés ou aux forces de sécurité, certaines victimes ne signalaient pas les sévices subis. Dans la plupart des cas, les responsables agissaient en toute impunité.

  • Une jeune fille de 15 ans a été enlevée au domicile d’un employé d’une organisation humanitaire. Elle a été violée à plusieurs reprises par au moins trois hommes en tenue militaire dans la nuit du 4 au 5 mars, au cours d’une perquisition ayant pour objet la recherche d’armes, dans la ville de Goz Beïda (est du Tchad). Bien que la famille de la victime ait porté plainte, les autorités n’avaient pris aucune mesure à la fin de l’année.
  • En juillet, une femme et sa fille de 13 ans ont été violées par des hommes en tenue militaire à Goré, dans le sud du pays. L’adolescente est morte des suites de ses blessures en septembre. À la connaissance d’Amnesty International, aucune enquête n’avait encore été ouverte à la fin de l’année.
  • Le 25 décembre, trois jeunes filles et une femme réfugiées du Darfour qui ramassaient du bois ont été violées près du camp de réfugiés de Gaga, dans l’est du Tchad, par quatre hommes armés. Des travailleurs humanitaires ont été informés que la police avait arrêté trois suspects.

Enfants soldats

Le 15 juin, le gouvernement tchadien et les Nations unies ont signé un plan d’action pour mettre fin au recrutement et à l’utilisation d’enfants par les forces de sécurité et les groupes armés. Fin 2011, on ignorait si la mise en œuvre de ce plan d’action avait commencé.

Conditions carcérales

Les conditions de détention étaient très éprouvantes et s’apparentaient à une forme de traitement cruel, inhumain ou dégradant. Les établissements pénitentiaires étaient surpeuplés et, bien souvent, les détenus n’avaient pas accès aux services médicaux ni à d’autres services essentiels. De nombreux prisonniers étaient malades et sous-alimentés.

Morts en détention

  • Le 17 septembre, neuf hommes sont morts asphyxiés quatre heures après avoir été placés en détention dans les locaux de la gendarmerie nationale de Léré, une ville de la région du Mayo-Kebbi Ouest (sud du Tchad). Certains avaient été maltraités au moment de leur arrestation. À la suite de ces décès, les détenus qui se trouvaient encore à la gendarmerie ont été transférés à la prison centrale de N’Djamena, où un autre homme – Bouba Hamane – est mort ultérieurement. À la connaissance d’Amnesty International, aucune enquête n’avait été ouverte sur ces 10 décès à la fin 2011.

Torture et autres mauvais traitements

Régulièrement, des policiers, des gendarmes ou des membres de l’Agence nationale de sécurité (ANS) torturaient les suspects, parfois avec la complicité des autorités administratives locales.

  • Le 20 septembre, Guintar Abel, un fonctionnaire de la sous-préfecture de Ngondong, dans le département du Lac Wey (sud du pays), est mort à l’hôpital trois semaines après avoir été battu par un sous-préfet et ses gardes du corps. Aucune mesure ne semblait avoir été prise à la fin de l’année.

Arrestations et détentions arbitraires

Cette année encore, des agents de l’ANS ont placé des personnes en détention sans inculpation. Certains détenus n’ont pas été autorisés à recevoir la visite de leurs proches ni à consulter un médecin ou un avocat. D’autres personnes ont été arrêtées par la police ou la gendarmerie dans le cadre d’affaires civiles, en violation de certaines dispositions de la Constitution et du droit tchadiens.

  • Deux étudiants, Bebkika Passoua Alexis et Nedoumbayel Nekaou, ont été interpellés le 7 mai dans une gare routière de N’Djamena, au motif qu’ils détenaient des documents appelant les Tchadiens à organiser des manifestations. Les deux hommes ont, dans un premier temps, été détenus au secret par l’ANS avant d’être transférés dans la prison centrale de N’Djamena. Ils ont été condamnés à huit mois d’emprisonnement avec sursis et ont recouvré la liberté le 22 septembre.

Défenseurs des droits humains

Comme les années précédentes, des défenseurs des droits humains ont fait l’objet de manœuvres d’intimidation et de harcèlement de la part de représentants de l’État, en particulier dans les régions isolées de l’est et du sud du pays.

  • Le 19 septembre, à la suite d’une manifestation dénonçant le renvoi d’un sous-préfet, la présidente locale de la Cellule de liaison et d’information des Associations féminines (une organisation nationale de défense des droits des femmes), Kedigui Taroun Grace, a été arrêtée par des policiers en même temps que cinq autres femmes, à Sarh, dans le sud du pays. Les six femmes ont été libérées plus tard dans la même journée, mais Kedigui Taroun Grace a été de nouveau interpellée le 29 septembre. Cette fois encore, elle a été remise en liberté le jour même. Elle n’a fait l’objet d’aucune inculpation mais les autorités locales l’ont prévenue qu’elle était considérée comme « politisée ».
  • Le 19 décembre, Daniel Deuzoumbe Passalet, président de l’organisation tchadienne Droits de l’homme sans frontières, a été arrêté à N’Djamena. Au cours d’une interview qu’il avait donnée la veille à Radio France Internationale (RFI) il s’était déclaré préoccupé par l’impunité entourant la mort en septembre, à Léré, de 10 hommes qui se trouvaient aux mains de la Gendarmerie nationale. Daniel Deuzoumbe Passalet a été remis en liberté le 30 décembre, la haute cour de N’Djamena siégeant à Moussoro ayant conclu en l’absence de preuves suffisantes pour l’inculper.

Liberté d’association et de réunion

Plusieurs milliers de personnes, dont des magistrats, des enseignants et des professionnels de santé, ont manifesté de façon pacifique à N’Djamena, en octobre et en novembre, pour dénoncer le bas niveau des salaires et la hausse du prix des denrées alimentaires et du carburant. À la suite de ces mouvements de protestation, des personnes ont été arrêtées et battues et d’autres ont été placées en détention.
 

Liberté d’expression – syndicalistes

Des syndicalistes ont été la cible de manœuvres de harcèlement ; certains ont été arrêtés de façon arbitraire.

  • Boukar Barka, un homme de 61 ans secrétaire général de la Confédération syndicale du Tchad (CST), a été arrêté le 4 novembre à son domicile, à N’Djamena, par des membres des services de sécurité. Les autorités ont affirmé que cette interpellation était liée à la condamnation pour détournement de fonds dont Boukar Barka avait fait l’objet par le passé. Libéré le 11 novembre, il a de nouveau été arrêté le 13 novembre et détenu au poste de police de Moursal, avant d’être transféré à la prison centrale de N’Djamena le 14 novembre. Il a, par la suite, été inculpé de « provocation directement liée à une manifestation non armée ». L’arrestation de Boukar Barka et son placement en détention faisaient suite au soutien que son syndicat et lui avaient accordé aux anciens employés de Tchad Cameroon Contractor, un sous-traitant d’Esso impliqué dans le projet d’aménagement de l’oléoduc Tchad-Cameroun.

Expulsions forcées

Initiée en 2008, la campagne d’expulsions forcées s’est poursuivie à N’Djamena, lésant plusieurs centaines de personnes dont les habitations ont été détruites. Ces expulsions se faisaient en dehors de toute procédure régulière et sans que les intéressés aient été consultés ni avertis selon des modalités satisfaisantes. Ceux qui ont perdu leur foyer n’ont pas bénéficié de solution de relogement ni d’autres formes d’indemnisation, alors que des décisions de justice avaient été prononcées dans ce sens. La plupart des sites dont les habitants avaient été expulsés demeuraient inoccupés à la fin de l’année. Les autorités municipales de N’Djamena ont annoncé de nouveaux projets d’expulsions, qui concerneraient plus particulièrement les quartiers de Sabangali et de Gassi 3 et 4 dans la capitale.
 

Justice internationale – Hissène Habré

Bien que l’Union africaine (UA) ait déclaré en 2006 que l’ancien président tchadien Hissène Habré devait être jugé au Sénégal « au nom de l’Afrique », ce procès n’avait toujours pas eu lieu. En juillet, la Commission de l’UA a estimé que le Rwanda était le pays le mieux indiqué pour se voir confier le procès d’Hissène Habré. Cette déclaration faisait suite à la session de l’Assemblée des chefs d’État et de gouvernement de l’UA, qui demandait instamment au Sénégal de juger rapidement Hissène Habré ou de l’extrader vers tout autre pays disposé à le juger. Des organisations de défense des droits humains, ainsi que des victimes tchadiennes et leurs avocats, ont indiqué préférer que le procès se déroule en Belgique. Les autorités belges ont en effet enquêté sur l’affaire, inculpé Hissène Habré de graves atteintes au droit international humanitaire et relatif aux droits humains, et déposé en 2005 auprès du Sénégal une demande d’extradition, qui a été réitérée en novembre. Le gouvernement tchadien a publiquement approuvé cette option. En novembre, le Comité contre la torture [ONU] a exhorté le Sénégal à prendre toutes les mesures nécessaires pour juger Hissène Habré ou, à défaut, à accepter la demande d’extradition.

Impunité

Des fonctionnaires tchadiens et des membres de groupes armés responsables de graves violations des droits humains, dont des homicides illégaux, des viols et d’autres actes de torture, ont continué d’agir dans l’impunité.
  • Le 10 janvier, le chef de l’État a signé une ordonnance accordant l’amnistie pour les crimes commis par les membres de groupes armés. Certaines des personnes amnistiées étaient soupçonnées de crimes relevant du droit international.
  • D’importantes recommandations de la commission chargée d’enquêter sur les événements survenus au Tchad entre le 28 janvier et le 8 février 2008 n’avaient toujours pas été mises en œuvre à la fin de l’année, malgré l’adoption, le 23 mai, d’un décret présidentiel instaurant un comité de suivi. Au nombre de ces recommandations figurait l’ouverture d’une enquête sur le sort réservé au dirigeant de l’opposition Ibni Oumar Mahamat Saleh. Arrêté le 3 février 2008 à son domicile, à N’Djamena, par des membres des services de sécurité, celui-ci avait ensuite été victime de disparition forcée.
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22 juin 2012 5 22 /06 /juin /2012 22:40

Dans cet atelier proposé par Enda Pronat, sont venus témoigner, des militants du Bénin, du Mali, du Sénégal et du Cambodge.

Selon le pays et le contexte politique, le processus prend des formes diverses. Une militante souligne qu’en Colombie, la spoliation des paysans passe par l’intervention militaire, sous couvert de lutte contre les narcotrafiquants. Les témoins africains précisent qu’ils sont confrontés à trois formes d’accaparement de terre : les notables locaux, les fonds souverains de pays étrangers, les multinationales.

Selon les acteurs, la finalité de la prise de contrôle des terres agricoles diffère : les fonds souverains cherchent à assurer la sécurité alimentaire dans leur pays (Arabie Saoudite, Chine,...), les notables locaux trouvent là un moyen d’asseoir leur fortune personnelle, les multinationales et autres investisseurs étrangers y voient un placement spéculatif, ne se préoccupent pas de l’exploitation des terres "acquises". Quelle que soit la finalité, c’est toujours une spoliation brutale des paysans, des violences, des interventions armées, la criminalisation des actions de résistance des populations, une atteinte grave à la biodiversité (monoculture avec apport massif d’intrants chimiques, cultures destinées à la production d’agrocarburants : jatropha et canne à sucre).

L’atelier apportait un éclairage particulier sur l’ampleur des dégâts, en citant quelques chiffres marquants : la Banque Mondiale annonce 42 millions d’hectares déjà passées aux mains des spéculateurs ces dernières années, dont 75% en Afrique ; les paysans sénégalais ont perdu 30% des terres agricoles ; au Mali, sur la zone irrigable de l’Office du Niger, 56 % des familles disposent de moins de 3ha, alors qu’il faut au minimum 5ha pour nourrir une famille, et cependant 600 000ha sur un total de 1,3 millions ont déjà changé de main.

Le Sommet des Peuples fournit une belle opportunité d’échanges et de consolidation des réseaux. Au Bénin (avec"Synergie Paysanne"), au Mali (avec le ROPPA) au Sénégal (avec Enda Pronat), mais aussi au Cambodge, en Colombie, … les paysans s’organisent, développent les réseaux, défendent le droit d’accès à la terre, l’agriculture vivrière, la souveraineté alimentaire.

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22 juin 2012 5 22 /06 /juin /2012 22:29
Les journaux tchadiens de cette semaine ont focalisé leur Unes entre autres sur la crise entre le ministre de la Justice et des magistrats, le contrôle du ciment par la mairie…
«Crise entre le ministre de la Justice et des magistrats», c’est le titre à la Une de l’Hebdomadaire La Voix. Le confrère nous informe que désormais, ce n’est plus seulement le Conseil supérieur de la magistrature qui pourra sanctionner les hommes en robe noire. L’Assemblée nationale vient de voter un texte dans ce sens. Le journal ajoute que le vote de la loi de ratification de l’ordonnance 007 portant statut de la Magistrature n’aura pas été une sinécure pour, Abdoulaye Sabre Fadoul, ministre de la Justice, de l’Assainissement public et de la Promotion de la Bonne Gouvernance. La Voix relève que ; tenu en respect par les députés qui rechignaient à voter son projet de loi, le ministre en charge de la Justice n’a cessé de montrer des signes d’inquiétude. Surtout que le parlement venait de rejeter le projet portant statut particulier des délégués gouvernementaux auprès de certaines communes. Le confrère conclu que toutefois, «la nouvelle ordonnance interdit les magistrats de se mêler de la politique».

L’hebdomadaire l’Union quant à lui, fait un gros plan sur la gestion du Premier ministre tchadien, Monsieur Emmanuel Nadingar. Il établit un état des lieux sans complaisance de la manière dont le premier ministre mène son action et de ce qui reste à faire. Au travers d’interviews des différentes personnalités, l’Union analyse qu’en deux ans Monsieur Emmanuel Nadingar a expérimenté des stratégies politiques, qui ont fait les intérêts de la galaxie présidentielle sur toute la chaîne.

L’hebdomadaire Observateur présente les photos de trois femmes dont l’une serait la future premier ministre. Me Jackeline Moudeina, Dr Lambatim Hélene et Me Kemneloum Djiraibé Delphine. Le confrère note que des rumeurs sur un probable départ du premier ministre Emmanuel Nadingar de la Primature alimentent les débats depuis quelques jours. Quelques femmes juristes de la société civile figuraient sur la liste des premiers ministrables. «Selon des sources proches de la Présidence de la République, le chef de l’Etat veut se départir de son premier ministre. Dans les coulisses de la présidence, les noms de ces trois femmes circulent. L’une de ces trois femmes, aura la chance de diriger le futur gouvernement», relève l’Observateur.

Les diverses décisions du ministre de la Sécurité Publique, Monsieur Ahmat Bachir défraient la chronique. N’Djaména Bi-Hebdo s’interroge: «Bachir, bourreau ou écolo tardif?» Le confrère poursuit que l’interdiction de naviguer sur les fleuves Chari et Logone, d’y pêcher ou laver des habits, la panoplie des mesures drastiques prises le week-end dernier par le ministre de la Sécurité publique et de l’Immigration, Ahmat Bachir, fait grincer des dents au sein de la population. Cette décision a suscité la réaction du député fédéraliste Béral Mbaikoubou, en titrant «Du super flic à super voyou». De l’avis du député fédéraliste, les décisions du ministre de la Sécurité publique actuel sont une insulte vivante à l’intelligence humaine. Ce triste handicap dit-il, est certes une pathologie commune au gouvernement de notre cher pays, voire du régime sous lequel nous croupissons, mais, le ministre constitue la crème de cette vilenie. «A voir ce que fut l’Homme et qui il est, seul le silence est grand», conclu le député.

«La zone rouge du Chari et du Logone: De Chagoua à Milezi, toute activité est interdite », titre le quotidien le Progrès. Selon ce quotidien, juste 48 heures après l’annonce de la décision du ministre de la Sécurité Publique et de l’Immigration interdisant la traversée des fleuves Chari et Logone en pirogue, la présence humaine n’est visible que du côté camerounais. Les pêcheurs, les blanchisseurs et les postes installés pour collecter les «taxes» de traversée des fleuves, sont déguerpis. Une brigade mixte, composée de policiers et gendarmes, ratisse la «zone rouge» dans la matinée du samedi 9 juin 2012. La brigade est passée aux abords des fleuves Chari et Logone, côté tchadien, pour expliquer et mettre en œuvre la mesure à toutes les personnes détentrices d’étals et de hangars, aux piroguiers et les agents en postes chargés de surveiller la traversée.

L’Union trouve que la décision du ministre de la Sécurité Publique est un embargo sur les fleuves Chari et Logone. L’hebdomadaire explique que le ministre déclare la guerre aux blanchisseurs, piroguiers et autres usagers des fleuves Chari et Logone. Les chauffeurs, les motocyclistes et les mendiants sont aussi sur la ligne de mire.

Le quotidien le progrès sur un autre sujet, informe que la mairie contrôle le ciment «made in Chad». Il souligne que les N’Djaménois courent, encore, derrière le ciment tchadien. Lorsqu’ils se lassent, la mairie leur redonne l’espoir de le leur rendre accessible. «Le meilleur contrôle promis ne vient pas. Mais, comme le voisin ou le parent a pu s’acheter quelques sacs, il peut y en avoir, aussi, pour soi, s’encouragent les potentiels constructeurs. Tous attendent ce ciment inaccessible. Les gens des provinces, qui veulent, aussi, construire n’en parlent, pourtant, pas», explique le quotidien. Un autre confrère indique que le produit de Baoré ne soulève pas de poussière là-bas. Et si, comme les gens des provinces, les N’Djaménois faisaient tous comme s’il n’existait pas de ciment tchadien, ils se seraient donné le temps de connaître, précisément, ceux qui le stockent, le détournent, le consomment.

Dans le cadre de la coopération Tchad-Egypte, un journal de la place nous informe que de retour d’une visite de travail en République Arabe d’Egypte, le ministre de l’Enseignement supérieur, Ahmet Djidda Mahamat, a fait un compte rendu des retombées de sa mission auprès des responsables égyptiens de l’enseignement supérieur. Selon le ministre Ahmet Djidda Mahamat, un accord d’augmentation, dès l’année académique 2012-2013, du nombre de bourses aux étudiants tchadiens a été signé avec le ministère de l’Enseignement supérieur égyptien. Le nombre d’étudiants tchadiens en Egypte est estimé, d’après M. Ahmet Djidda Mahamat, à environ 630, actuellement.

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22 juin 2012 5 22 /06 /juin /2012 22:26

N’Djaména, capitale tchadienne, est confrontée à un grave problème d’insalubrité, selon une enquête publiée la semaine par une association nationale. Les autorités municipales, elles, reconnaissent l’ampleur du problème et s’activent à le résoudre.

"Le taux d’insalubrité à N’Djaména est de de l’ordre de 67%", révèle l’enquête menée, pendant cinq mois sur un échantillon de 2. 000 concessions, par l’Association tchadienne pour la réussite environnementale (ATRENVIRO). Sur les dix arrondissements que compte la capitale tchadienne, les 10ème, 7ème et 9ème sont les plus insalubres, avec des taux dépassant les 70%.
La ville de N’Djaména qui compte près d’un million d’habitants, produit de 800 tonnes de déchets solides par jour et seules 400 tonnes sont régulièrement enlevées.
L’étude de l’ATRENVIRO lie les causes de l’insalubrité aux aires de dépôt des ordures ménagères, au ramassage des ordures et à l’utilisation, par certaines personnes, des mares et espaces non aménagés comme lieu de défécation. Ainsi, seuls 40% des ménages déposent leurs ordures dans des bacs disposés devant leurs concessions ; 40% autres les versent dans des mares ou espaces non aménagés.
Dans certains quartiers, les ménages n’utilisent pas les bacs à ordures distribués par la mairie. Dans d’autres, les moyens conséquents pour assurer la collecte des déchets ménagers manquent cruellement. Selon l’enquête, les ordures sont visibles à 66% dans les quartiers et 80% des ménages ne paient pas de taxes sur les ordures.
"La disponibilité des données de cette enquête est nécessaire à la mise en place d’une stratégie pour un environnement propre et vivable. Car l’insalubrité immédiate nuit dangereusement à la santé de la population", déclare Zoumaï Zoua, président de l’ATRENVIRO.
En milieu scolaire, les résultats de l’enquête affirment qu’il n’y a pratiquement pas de programme d’enseignement relatif au problème de l’insalubrité.
"Ce rapport de recherche servira de guide d’orientation pour les politiques de lutte contre l’insalubrité", promet Loum Hinansou Laïna, 2ème adjoint au maire de la ville de N’Djaména.
Il ajoute que les résultats de cette enquête viennent confirmer les maux qui entravent la salubrité de la capitale : inconscience de la population, organisation de la collecte des déchets ménagers, présence des mares et espaces libres non aménagés, etc.
"La responsabilité dans l’insalubrité de la ville de N’Djaména est partagée à tous les niveaux. Chaque acteur concerné doit prendre ses responsabilités pour faire de N’Djaména la vitrine de l’Afrique", conclut M. Zoumaï Zoua.
Le gouvernement et la mairie de N’Djaména avaient une decision de de faire de la capitale tchadienne "la vitrine de l’Afrique", à travers un ambitieux projet dénommé "N’Djaména Nadif", c’est-à- dire "N’Djaména la neuve" en Arabe local.
Ils ont réussi à interdire l’importation et l’utilisation des très encombrants emballages en plastique (communément appelés " lédas") et à transformer la ville avec plusieurs infrastructures, mais le pari reste toujours compromis par l’insalubrité, l’insécurité et bien d’autres maux.
En 2009, la municipalité a confié la collecte des ordures dans la capitale à une société camerounaise, Hysacam. Mais à la suite d’un désaccord, le contrat a été rompu et le service est exécuté par une structure dénommée "N’Djaména Nadif".
Les véhicules de N’Djaména Nadif passent une ou deux fois ramasser les ordures des ménages qui, en retour, doivent payer 1. 500 francs CFA par mois. Mais les activités sont limitées à quelques quartiers.
En février dernier, la mairie a inauguré six centres de transfert d’ordures ménagères dans certains arrondissements qui ne sont pas desservis par le service de N’Djaména Nadif. Chaque centre a été équipé de charrues, de quatre caisses et d’une benne. Les charrues passent de porte en porte pour enlever les ordures.
"Nous avons des équipes techniques avec les moyens modernes. Les agents municipaux réglementent les dépôts dans ces centres qui respectent les normes en matière de protection de l’environnement", affirme Abakar Bichara, chef de Service Propreté à la mairie de N’Djaména.
La saison des pluies a déjà commencé, et avec lui viendra son corollaire d’inondations. Pour prévenir les dégâts, les services de la voirie se sont lancés dans le curage de plus de 100.000 mètres de caniveaux.
"Le curage des caniveaux ne se fait pas sur toute la capitale. Il est limité sur les caniveaux maçonnés. Et ce n’est pas tous les caniveaux maçonnés qui doivent être curés, c’est seulement ceux qui sont pleins", explique Youssouf Daoula, chef de service adjoint de la voirie.
"Dans les quartiers périphériques, nous n’intervenons que quand il y a urgence. S’il faut prendre tous les caniveaux de la ville de N’Djaména, la mairie ne peut pas supporter le coût", ajoute-t- il.
Pour lutter contre les inondations et ses conséquences, la mairie de N’Djaména a adopté, en juillet 2011, un Plan d’actions à court et moyen terme, d’un coût global de plus de 28 milliards F CFA. La mise en oeuvre de ce Plan reste compromise par des contributions qui ne sont pas à la hauteur.
Dans les quartiers périphériques, l’on craint qu’avec les pluies l’accès aux centres de transfert des ordures ne soit pas possible car la plupart desdits centres sont installés dans les zones inondables.
On craint ainsi de se retrouver avec les ordures sur les bras, ce qui pourrait causer des maladies telles que la poliomyélite, la méningite et le choléra. L’an dernier, plus de 17.000 cas de choléra ont été recensés au Tchad, avec 459 décès.

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21 juin 2012 4 21 /06 /juin /2012 23:48

Plus de cent vingt chefs d'État se retrouvent à Rio du 20 au 22 juin pour le cinquième Sommet de la Terre. La trentaine de représentants du continent plaidera la cause d'une région qui veut protéger son environnement sans sacrifier sa croissance.

Comme tous les dix ans à l'entrée de l'été, 120 chefs d'État, accompagnés de 50 000 personnalités du monde de l'économie, de la politique et de la société civile, se retrouvent au chevet de la planète pour participer à un Sommet de la Terre sous l'égide des Nations unies. Après Stockholm (1972), Nairobi (1982), Rio de Janeiro (1992) et Johannesburg (2002), tout ce beau monde est de retour vingt ans plus tard dans la mégalopole brésilienne pour Rio+20 jusqu'au 22 juin. Un hommage au sommet de 1992 qui avait abouti à la « déclaration de Rio » et ses 27 principes, lesquels avaient débouché, en 1997, sur le protocole de Kyoto, l'unique traité international de lutte contre l'effet de serre. Le document n'a cependant jamais été ratifié par les États-Unis, avant d'être dénoncé par le Canada fin 2011...

Toutefois, comme l'affirme Denis Sassou Nguesso, le président du Congo, « la bonne nouvelle vient d'Afrique. Les Africains font partie de ceux qui marchent en première ligne sur le chemin nouveau. L'Union africaine considère Rio+20 comme une occasion supplémentaire de placer réellement, concrètement et définitivement le développement durable au coeur de ses priorités ». C'est d'ailleurs l'un des deux thèmes majeurs du sommet avec « l'amélioration de la coordination internationale ».

Une trentaine de chefs d'État africains, emmenés par le président congolais, font le déplacement pour plaider la cause de l'Afrique et éviter le scénario du pire. « L'Afrique n'a pas contribué au problème du changement climatique, mais elle sera la région du monde la plus affectée », déplore Bineswaree Bolaky, économiste de la division Afrique à la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced). Déforestation, montée des océans, désertification, épuisement des ressources naturelles, disparition de terres agricoles, insécurité alimentaire, urbanisation galopante, manque d'accès à l'énergie et à l'eau, augmentation du chômage, creusement des inégalités... Le changement climatique peut entraîner un effet domino aux conséquences dévastatrices pour l'Afrique si rien n'est fait pour l'enrayer. Cette épée de Damoclès qui pèse sur le continent et s'abattra d'ici à vingt ou trente ans sur la tête de 2 milliards d'Africains sera évoquée lors de l'« Africa Day » qui se tient le 19 juin à l'initiative du Congo-Brazzaville lors de Rio+20, à la veille de la réunion des 120 chefs d'État.

Pression

"Les Africains sont en première ligne", se réjouit Sassou Nguesso.

L'un des principaux défis du continent est de préserver l'environnement et les ressources naturelles pour les générations futures sans sacrifier la croissance soutenue indispensable au développement. « À mesure que les économies africaines se développent, la pression sur l'environnement augmente et l'exploitation des ressources s'intensifie », s'inquiète Bineswaree Bolaky, l'une des auteures de « Transformation structurelle et développement durable en Afrique », le rapport de la Cnuced publié le 13 juin. « Aujourd'hui, poursuit-elle, l'Afrique consomme 5 milliards de tonnes de matières premières issues de son sol (énergie fossile, minéraux, biomasse...) par an. Si la croissance annuelle du continent se poursuit à un rythme annuel de 7 %, le PIB de l'Afrique sera multiplié par quinze d'ici à 2050 et la consommation de matières premières s'élèvera à 72 milliards de tonnes. »

Depuis dix ans, explique en substance le document de la Cnuced, le continent connaît une forte croissance, mais elle n'est pas durable et repose sur l'exploitation de ressources naturelles épuisables, sans création de valeur ajoutée ni d'emplois. L'Afrique dispose cependant « d'une marge de manoeuvre pour éviter les erreurs des pays industrialisés et ne pas suivre leur schéma de développement peu durable », assure l'organisation. Une analyse partagée par la Banque africaine de développement (BAD). « L'Afrique a le choix. Adopter une approche plus durable de développement peut procurer des avantages en termes de sécurité de l'environnement et de bien-être, ainsi qu'une compétitivité accrue », affirme Donald Kaberuka, le président de la BAD, qui a présenté le 1er juin un rapport sur « l'empreinte écologique de l'Afrique ».

Découplage

Plusieurs pistes pour une croissance verte sont esquissées. Elles reposent sur deux piliers : l'agriculture et l'industrie. « On ne peut pas demander à l'Afrique de renoncer à exploiter ses matières premières, elle en a impérativement besoin pour son développement. Mais elle peut recourir à des technologies qui lui permettront de les économiser pour produire plus avec moins », estime Bolaky. Ce que la Cnuced appelle le « découplage relatif ». En clair, il s'agit pour l'agriculture d'obtenir de meilleurs rendements en utilisant moins d'intrants et d'eau. Pour l'industrie, cela consiste à prendre des mesures qui limitent les pollutions (efficacité énergétique, recours aux énergies renouvelables et aux technologies propres, recyclage, réduction des déchets...)

La défense de l'environnement n'est donc plus uniquement un problème de pays riche. L'Éthiopie semble l'avoir compris. Sous l'impulsion de Mélès Zenawi, son Premier ministre, le pays a adopté le Climate-Resilient Green Economy (CRGE). Présenté à Rio, il sera mis en oeuvre à partir de 2013 et prévoit de multiplier par cinq la production hydroélectrique pour couvrir 90 % des besoins en 2030. Reste à trouver les moyens financiers. « Placer l'Afrique sur une trajectoire de croissance à faibles émissions de carbone » demandera entre 9 et 12 milliards de dollars (entre 7 et 9,5 milliards d'euros) par an jusqu'en 2015, a calculé la BAD. Reste à savoir si l'appel sera entendu à Rio. Rien n'est moins sûr. Et c'est sans doute le principal défi que vont devoir relever les représentants africains présents sur place.

Quand les chefs s'en mêlent

À Copenhague, en décembre 2009, lors du Sommet sur le climat, le représentant de l’Union africaine était le Premier ministre éthiopien, Mélès Zenawi. Deux ans plus tard, la Conférence de Durban était présidée par l’hôte sud-africain, Jacob Zuma. Cette fois, à Rio, le président congolais, Denis Sassou Nguesso, sera la voix du continent. Son atout, c’est la forêt du bassin du Congo, le deuxième poumon vert dans le monde après l’Amazonie. « Ce poste est très convoité et fait l’objet d’une intense bagarre, explique un haut diplomate africain. Car les questions d’environnement sont très positives en termes d’image. »À cela s’ajoute une réelle prise de conscience. L’économie verte, le marché du carbone, l’exploitation durable des forêts, la défense de la diversité ont fait leur apparition dans les discours politiques. D’autres chefs d’État l’ont bien compris, comme Ali Bongo Ondimba au Gabon ou le roi MohammedVI au Maroc… Une liste qui est appelée à s’élargir. Philippe Perdrix.

Jeuneafrique

 

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