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14 mai 2010 5 14 /05 /mai /2010 21:26

Le premier train express d'Afrique du Sud sur les rails pour le Mondial par Isabelle Rey-Lefebvre (Le Monde. 13.05.10)

Le train express qui doit relier, en un quart d'heure, l'aéroport Tambo de Johannesburg, capitale économique de l'Afrique du Sud, au centre-ville sera-t-il prêt, le 8 juin, pour le début de la Coupe du monde de football ? Il en va de l'image du pays, qui veut montrer au monde entier à quel point il a su se moderniser. Mais le chantier de cette première phase du "Gautrain", liaison ferroviaire de la province du Gauteng, est loin d'être achevée. L'un des constructeurs, Bouygues, et son exploitant, la Régie autonome des transports parisiens (RATP), n'en sont eux-mêmes pas certains, mais redoublent d'efforts pour y parvenir.

Dans un pays où pas grand monde sait conduire métros ou trains express, la RATP a recruté 18 futurs conducteurs et les forme sur simulateurs. Les premières rames sont testées sur voie, le jour, et le chantier reprend, la nuit, sur plusieurs sites et gares. Sur l'ensemble de la future ligne de 80 kilomètres, jusqu'à Pretoria, 45 chantiers, dont 15 d'ouvrages hors du commun, sont menés de front, et 10 000 ouvriers s'y affairent.  D'un montant de 2,5 milliards d'euros, c'est le plus grand projet ferroviaire d'Afrique. Il a été confié, dans le cadre d'un contrat de partenariat public-privé au consortium Bombela qui associe, pour la construction, Bouygues et Murray & Roberts, numéro deux du BTP sud-africain, et pour le matériel et les travaux électriques, le canadien Bombardier. La RATP sera, elle, exploitante pendant quinze ans.   Des partenaires sud-africains sont également au capital du concessionnaire, notamment, pour 25 %, Strategic Partners Group, sorte de fonds d'investissement qui réunit 18 sociétés dites du " black business " - c'est-à-dire appartenant exclusivement à des Noirs, dont certains proches du gouvernement - chargées de mettre en oeuvre le Black Economic Empowerment (BEE), un programme de discrimination positive.

Le BEE impose en effet qu'une partie du capital soit sud-africaine et que le projet profite aux populations défavorisées, les "previously disavantaged individuals", victimes du régime d'apartheid (1948-1991). Il s'agit des Noirs, bien sûr, mais aussi des femmes, des métis, des handicapés... "Le gouvernement vise la création de 90 000 emplois locaux, directs et indirects, et nous avons des objectifs précis, contrôlés chaque mois par un audit, d'embauches et de formation des membres de ces communautés", explique Christian Gazaignes, directeur général de Bouygues Travaux Publics. Le nouveau train express permettra de décongestionner la route entre Pretoria et Johannesburg, si encombrée qu'il n'est pas rare d'y perdre deux heures à parcourir quelques kilomètres. Mais le prix du billet le rendra inaccessible aux habitants des townships. "Nous ciblons la clientèle des classes moyennes, pour qu'elle abandonne sa voiture sur nos parkings de délestage, et les touristes, qui devront, par exemple, débourser 100 rands (10 euros) pour se rendre de Johannesburg à l'aéroport", détaille Laurence Le Blanc, directrice internationale de RATP Développement.

La date de livraison de la ligne a fait l'objet d'intenses négociations. Le contrat était déjà en cours lorsque la date de la Coupe du monde de football a été fixée et, pour la faire coïncider avec la fin du chantier, il fallait anticiper celui-ci de près de cinq mois. C'était sans compter sur les retards que l'administration a accumulés pour libérer les terrains d'emprise de la voie. Conséquence : la province du Gauteng a dû majorer sa subvention, afin de renforcer les effectifs pour être prêt à temps. L'inauguration par le président sud-africain Jacob Zuma est programmée le 7 juin, la veille de l'ouverture de la Coupe, pas avant.

Un véritable cauchemar géologique

Le contrat de travaux de génie civil, de 1,3 milliard d'euros, se conclura peut-être par une perte pour Bouygues (600 millions d'euros) et son partenaire Murray & Roberts (700 millions d'euros). En cause : la zone des dolomites. Ce sous-sol composé de roche très dure se dissout au contact de l'eau et s'effondre à la moindre poche d'eau avec la formation de cavités irrégulières et aléatoires. Un vrai cauchemar pour les constructeurs qui ont dû recourir à des techniques plus coûteuses pour en venir à bout.

 

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