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23 février 2010 2 23 /02 /février /2010 18:03

 

Qu'il le veuille ou non, Total traîne derrière lui une réputation sulfureuse qui suscite le maximum d'adversité sur un front très large : consommateurs, écolos, politiques en quête de boucs émissaires, antilibéraux patentés...

Le groupe n'est pas seulement le symbole du capitalisme et du profit triomphants, rétif à la règle présidentielle des trois tiers : un tiers des bénéfices pour l'investissement, un tiers pour les actionnaires, un tiers pour les salariés. Soupçonné d'être moins prompt à baisser les prix à la pompe qu'à les augmenter, il traîne aussi quelques casseroles environnementales et sociétales (Erika, AZF, Birmanie) qui contribuent à brouiller un peu plus l'image de cette multinationale.

Autant dire que ce mastodonte ¯ l'entreprise que les Français adorent détester ¯ est évidemment pain bénit pour politiques en disette argumentaire pendant la campagne des régionales. Aujourd'hui, c'est à qui fera le plus fort dans la démagogie. On pourrait sourire de voir le caricatural UMP Frédéric Lefèvre aller sur le terrain de la CGT, ou le socialiste Benoît Hamon renouer avec une vision étatiste archaïque !

On doit plutôt s'en désoler. Ces messieurs ne sont que des pompiers pyromanes qui mettent de l'huile sur le feu pour des intérêts de court terme. Ainsi, l'entreprise est totalement prise au piège de la politique, d'une surenchère irresponsable qui n'augure rien de bon. Sinon pour la CGT, qui ne pouvait espérer un carburant mobilisateur aussi inédit.

Après le cas de Renault, où la direction a, somme toute, imposé sa vision stratégique, et celui de Heuliez, où l'on est dans l'impasse, le cas de Total illustre aussi les limites du volontarisme industriel à la française. Il ne suffit pas de convoquer dare-dare, à l'Élysée, tel ou tel président d'entreprise et de claironner à tout propos les vertus de l'usine made in France pour faire bouger les lignes et les patrons. Ni plaider sans arrêt pour la France compétitive de demain et tout faire pour maintenir en survie artificielle celle d'hier.

Il s'agit encore moins de pratiquer une gesticulation médiatique bruyante et répétitive. Christian Estrosi a beau dire, la caravane passe. Entre le fatalisme affiché de Lionel Jospin ¯ l'État ne peut pas tout ¯ et le volontarisme débordant mais peu efficace de Nicolas Sarkozy, il y a peut-être une troisième voie à explorer, à inventer. En partant des faits et non des slogans. Le raffinage n'est pas un problème spécifique à Total. Il est celui d'une filière mondialisée au fonctionnement anarchique ¯ sans régulation ¯ et en fortes surcapacités. Nier cette vérité élémentaire, c'est se préparer à de sérieux déboires.

Paul Burel
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